Il est une forme particulière du sado-masochisme que l’on n’étudie pas assez. C’est la relation entre l’auteur d’un écrit et le document produit, entre l’humain et l’archive, relation trouble s’il en est, sauf que les technologies numériques ont inversé les rôles du dominant et du dominé…
Démonstration.
Traditionnellement, l’homme domine les documents. Il profite de sa supériorité pour infliger aux documents divers sévices.
Ainsi, au XVIIe siècle (Sade n’était pas encore né), il était coutume d’enfoncer sans ménagement le bout métallique d’un lacet dans la chair d’une liasse de minutes notariales ou de pièces comptables puis de confectionner un nœud bien serré laissant tout juste respirer le papier.
À une époque plus récente, la relation de domination de l’homme sur les archives se traduit par des humiliations sans nombre : dossiers coincés dans une sangle serrée à fond, tassés dans un carton d’archives, traînés dans le sous-sol ; des rapports et des courriers sont expédiés dans un coin de grenier, où les oiseaux vont les couvrir de guano. Ailleurs, c’est un timbre sec ou un tampon baveux qui marque à tout jamais l’épiderme du plan ou de la gravure, permettant ainsi au détenteur du document-objet de savourer la jouissance de la possession. On pourrait décrire longuement les relations d’attachement du couple homme-archives car il existe au moins cinquante nuances de gré… ou de force.
Et les archives, soumises, se prêtent au jeu, patientent des décennies ou des siècles, attendent leur seigneur et maître qui les libérera l’espace d’un instant, leur montrera quelques heures la lumière naturelle avant de les renfoncer dans leur carcan, de les repousser dans le noir de la cave ou le gris des combles… C’est grisant !
Mais nous avons changé de millénaire et de technologies de communication. Une des conséquences de cette évolution est que les données sont devenues de toute évidence le partenaire dominateur dans le couple homme-document. Cette domination du numérique s’exprime au travers de petits gestes sadiques et virtuels qui mutilent peu à peu l’être humain, lequel se montre soumis, prisonnier volontaire bien souvent, étonnamment apte à la jouissance d’être instrumentalisé, noyé, mordu…
Tout d’abord, ce sont les mini-décharges électroniques envoyées à l’individu scotché à son smartphone, dans la rue, à la plage, au cinéma, au lit, partout ; toutes les trente secondes, le numérique rappelle sa présence par un SMS impérieux, sans laisser le moindre répit, à la manière d’un supplice chinois. Oui, oui, encore !
Dans l’entreprise, l’électronasse noie les collaborateurs, leur maintien la tête sous l’eau ou dans le sac, ne les laissant respirer que pour les faire replonger de plus belle dans la masse des versions périmées, des fichiers dupliqués, des trains de bit infinis qui l’entravent et gênent ses mouvements. C’est si bon !
Mais surtout, l’individu est esclave consentant de sa messagerie électronique : il se livre, imprudemment, laisse des traces, donne des verges pour se faire fouetter, accepte de se faire mordre…, prêt à attendre des mois voire des années le plaisir suprême de la morsure ! Ce n’est pas moi qui le dit mais le juge fédéral américain Royce C. Lamberth : « La question n’est pas de savoir si un de vos mails reviendra vous mordre, mais de savoir quand et avec quelle force. » (It’s not a matter of if an email will come back and bite you … It’s only a matter of when and how hard, citation relevée sur le site https://www.vaporstream.com).
Et le partenaire maso (homme ou femme) de s’écrier : « Mords ! Mords ! ».
Ce qui se conçoit aussi en version anglaise : « More ! More ! ».
Au plaisir de me lire,
dans le sado maso,
Ho Vampire de chez Vampire,
avec le plaisir de fantasmé, et d’offrir mon corps à qui le voudra,
avec le masque et les dents de vampire, me laisser dégusté comme un fruit, me mordre et faire trembler mon corps jusqu’à la douleur la plus extrême comme celle des archives ,
et me laisser totalement dominé,
des lectures comme ceci, je pourrais vous en écrire des quantités
Vous en souhaitant une bonne réception.
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Une très belle Documentation Archivistique de notre époque comtemporaine, avec une très grande réflexion documentaire.
Vous nous offrez une variante du sado-masochisme inattendue !!! bravo ! je réalise que l’on y est en fait tous adeptes sans le savoir !!!
La vérité la plus absolue…
Excellent et rafraîchissant.
Et si on tentait un billet « écolo » ???
D’accord Marina. Je mets écolo dans ma liste. Merci de proposer un mot.