Avant, je désherbais. Aujourd’hui, je cueille.
La messagerie électronique est un outil dont on ne saurait se passer, pas plus que du téléphone il y a vingt ans. Les outils se diversifient (messagerie instantanée, réseaux sociaux…) mais la messagerie reste le moyen le plus efficace de communiquer dans la vie professionnelle malgré des désagréments que je m’efforce de contourner.
On parle, à juste titre, de l’explosion des mails, de l’inflation exponentielle de la messagerie. Mais le nombre de courriels que vous écrivez et qui vous sont réellement destinés ne peut pas grossir sans fin. Je dirais même, en tout cas pour ce qui me concerne, qu’il est stable depuis quelques années. La différence est donc dans les mails non sollicités, les matraquages publicitaires, les spams purs et durs c’est-à-dire sans contenu, juste pour emmerder le monde, et ça marche ! Ce sont autant de mauvaises herbes qui étouffent les bons mails, une e-ivraie détestable.
Jusqu’à présent, je désherbais, c’est-à-dire que je supprimais manuellement les mauvais mails. J’ai essayé un temps de taguer certaines adresses comme indésirables, en vain car le logiciel de messagerie ne sait pas reconnaître ceux qui ont été mis à la porte quand ils se présentent par la fenêtre avec un déguisement. Pas au point la technique… Le même logiciel (Outlook pour ne pas le nommer, ni pire ni meilleur qu’un autre) classe en indésirables des messages qui ne le sont pas, ce qui oblige à contrôler cet autre répertoire que constituent les indésirables. J’ai aussi créé une autre boîte de messagerie réservée aux achats en ligne qui permet effectivement de freiner certains flux, mais ça repart de plus belle de l’autre côté !
De guerre lasse, déçue par les fonctionnalités des logiciels qui m’apparaissent de moins en moins performants, j’ai donc décidé de changer de formule. Maintenant, je cueille les bons mails pour les transplanter dans un autre répertoire, ma « vraie » boîte de réception. Vu la proportion d’indésirables, au sens large du terme, c’est-à-dire dont je n’ai rien à faire, j’y gagne en temps. J’y gagne surtout en épanouissement personnel car il est bien plus valorisant de sélectionner ce qu’il faut garder que de s’appliquer à jeter ce qui ne sert pas, n’est-il pas ?
Le sentiment désagréable de l’infobésité tient au fait que l’on regarde tout ce qui passe et que l’on se sent vite accablé par le volume d’informations, lesquelles sont majoritairement inutiles bien que le système veuille nous faire croire le contraire. La proportion de l’inutile croît et c’est donc à la quête de l’utile qu’il faut se consacrer et non à éviction de l’inutile. Une question d’état d’esprit. C’est ce que j’essaie d’enseigner à mes étudiants pour l’archivage. Au XXe siècle, les archivistes étaient formés à retirer des archives les pièces inutiles, les « papiers de corbeille », les brouillons, les doubles ou les copies qui représentaient une minorité des documents dans un dossier ; à l’époque, cela avait du sens. Cette pratique me semble complètement désuète, inefficace, oppressante, castratrice. Nous avons changé de siècle et les proportions de documents utiles à conserver parmi l’ensemble des informations produites a fondu, pour atteindre quelques pourcents.
La solution est donc de ne plus s’épuiser à retirer ce qui est inutile et, dans un mouvement inverse et économique, de capturer ce qui est utile pour le gérer dans un lieu contrôlé. Quand on a un doute sur la pertinence d’un mail, on peut toujours utiliser la technique du « purgatoire » (voir mon billet de l’an passé sur le sujet).
Un avantage tout de même à cette pollution numérique des boîtes aux lettres : j’ai entrepris il y a deux ans une collection de spams et je continue de cueillir les meilleurs. Ma collection comprend déjà plus de cent pièces fort intéressantes. Je songe à faire une exposition un jour prochain…
Merci. On est au moins deux… 😉
Bonjour,
je propose un ajout à cette solution: déposer les courriels cueillis avec les autres documents technologiques, dans le dossier par sujet du réseau, du serveur ou du répertoire (et non dans une autre boîte de messagerie). Ainsi, le dossier formerait un tout, il serait complet, soit la totalité de l’information, y compris celle transmise par courriel.
Merci de votre contribution, Natalie.
Oui, sans doute existe-t-il plusieurs solutions.
Je réalise que je me suis mal exprimée en parlant de ma vraie « boîte de réception » ; je voulais simplement parler d’un répertoire dont j’ai fait mon anti-chambre plutôt que la boîte de réception par défaut d’Outlook ;
Sur la question de dossier, nous sommes complètement d’accord. Ce que j’ai dit se place temporellement avant la création du dossier ; je me plaçais au moment de la distribution du courrier, non encore traité, comme si dans ma boîte aux lettres papier, je ponctionnais les courriers qui me sont vraiment destinés au lieu de devoir, à l’inverse, en retirer les publicités.