L’histoire, la géographie, la religion, toutes les disciplines aiment utiliser les chiffres pour organiser les connaissances. Les chiffres, c’est précis, pédagogique, symbolique, ésotérique, avec une faveur pour le chiffre sept :
les sept collines de Rome
les sept merveilles du monde
les sept péchés capitaux
les sept piliers de la sagesse
les sept couleurs de l’arc-en-ciel
les sept nains de Blanche-Neige
C’est épatant !
Il y a aussi les douze travaux d’Hercule, les douze apôtres et les douze imams (pour les chiites duodécimains), les neuf muses, les neuf vies du chat, les cinq continents, les cinq sens, les quatre saisons, les trois mousquetaires, sans oublier les trois âges des archives…
Revenons aux sept collines de Rome qui sont donc (dans l’ordre alphabétique) : Aventin, Cælius, Capitole, Esquilin, Palatin, Quirinal et Viminal. Tout le monde le sait, mais bizarrement, quand on veut les réciter, on n’en trouve que six…
Le Janicule, qui est géographiquement une colline et qui se trouve à Rome, ne fait pas partie des sept collines, pour au moins deux raisons : il se trouve hors les murs de la Rome antique, et il est le résultat, dans sa configuration actuelle, de siècles d’accumulation de débris autour de la cité romaine. Mais outre sa configuration physique qui, au-dessus du Transtevere, en fait un superbe point de vue sur la ville éternelle, le Janicule est aussi un lieu historique très symbolique de l’histoire de l’Italie puisque c’est là que Garibaldi vainquit les Français en 1849, bien après Romulus et Remus.
Les huit collines de Rome témoignent à la fois du poids de l’Antiquité dans la culture occidentale (pour combien de temps encore ?) et du besoin d’intégrer au discours historique les nouveautés, géographiques et humaines, siècle après siècle.
Il y a périodiquement des tentatives pour revoir le système de référence, plus ou moins couronnées de succès. Les arts libéraux du Moyen âge, au nombre de sept (grammaire, dialectique, rhétorique, puis arithmétique, musique, géométrie et astronomie) ont bel et bien été remplacés par les arts « modernes » : architecture, sculpture, arts visuels, musique (la seule à tirer son épingle du jeu), littérature, arts de la scène et le fameux septième art, le cinéma, à son tour dépassé, bien poussivement, par le huitième art (photographie) et le neuvième (BD), en attendant le dixième.
Ces références universelles mettent du temps à s’imposer, quand elles y parviennent. Ainsi, la liste des sept nouvelles merveilles du monde, concoctée par une fondation ad hoc et proposée au monde lors d’une grande messe à Lisbonne le 7/07/2007 ne semble pas, malgré la symbolique forcée de l’inauguration, en position de détrôner l’ancienne.
Il semble plus facile de prolonger une liste que de la remplacer. En littérature, cela suggère l’histoire du cinquième fils Aymon qui épouse la cinquième fille du Docteur March ; après la mille et deuxième nuit, ils décident de recueillir le 102e dalmatien, etc.