Grand débat. Analyse. Conservation. Prestataire. Bibliothèque. Archives. Histoire. Ce sont les mots-clés d’une petite polémique qui s’est élevée il y a quelques jours.

Les pouvoirs publics ont confié les cahiers de doléances issus du « grand débat » à la Bibliothèque nationale de France pour être numérisés et exploités, décision qui a provoqué une levée de boucliers de certains archivistes réclamant que ces archives publiques soient conservées dans les services publics d’archives (et non dans une bibliothèque). Elles le sont d’ailleurs déjà ou le seront demain. Quand le train du grand débat sera passé.

Cet incident n’a pas eu beaucoup d’écho dans la presse qui s’intéresse davantage au processus de consultation et aux contenus. Il en a été question sur les sites d’Europe1 et du Parisien, dans un article du magazine Archimag et sur le site web de l’Association des archivistes Français.

L’épisode est cependant révélateur d’une maltraitance certaine de la notion d’archives et d’un certain amateurisme en matière d’archivage, et en même temps (comme on dit maintenant) le symbole de l’émergence d’une nouvelle organisation « anarchivistique » de la production et du traitement des documents que la loi française continue d’appeler « archives ».

Les faits

Les faits rapportés par les quelques sources citées ne sont pas si clairs mais suffisamment tout de même pour comprendre que:

  • les responsables de la mission du grand débat ont décidé de confier au service numérique de la Bibliothèque nationale de France la numérisation des cahiers afin que les prestataires privés chargés de l’analyse des données et de la mise en forme de la synthèse puissent travailler sur une base de données homogène; quant à l’archivage, « de l’aveu même de la mission du grand débat national, on reconnaît que la question de l’archivage des cahiers de doléances n’a pas encore été tranchée » (Europe 1)…;
  • les cahiers de doléances rédigés dans les mairies (plus de 10000) sont collectés par les préfectures qui les font suivre à la Bibliothèque nationale de France (Europe 1);
  • les cahiers une fois numérisés « seront renvoyés aux Archives départementales qui en assureront la conservation matérielle » (Le Parisien).

De son côté, à l’annonce d’un envoi des cahiers à la Bibliothèque nationale, l’Association des archivistes français « rappelle que la destination finale de ces documents, qu’ils soient papier ou dématérialisés, ne saurait être autre que les services publics d’archives territorialement compétents, où des archivistes, professionnels de la conservation, ont pour mission depuis la Révolution de collecter les documents d’archives publiques pour les mettre à la disposition du plus grand nombre ».

Le magazine Archimag fait son enquête et rapporte que « la cheffe du service interministériel des archives estime que « l’ensemble des contributions citoyennes au grand débat, qu’elles soient sur support papier (cahiers citoyens, courriers) ou sur support numérique (contributions sur les plateformes, messages électroniques), constituent bien des archives publiques » ».

Une légèreté impressionnante

En marge de l’opération technique de numérisation et du fait que les cahiers seront bien mis en sécurité quelque part, l’attitude des différents acteurs ne manque pas de « légèreté »:

  • les services d’archives s’opposent aux bibliothèques alors qu’il s’agit d’institutions sœurs et que dans d’autres pays Archives et Bibliothèque forment une seule et même institution, comme c’est le cas au Canada depuis 2004;
  • les porte-paroles de la plus ancienne des institutions culturelles françaises (la bibliothèque royale a été créée au 14e siècle) se vantent de la performance de ses outils de scan et d’océrisation que des connaissances qu’elle abrite;
  • les archivistes parlent de « destination finale », expression qui non seulement est tristounette en soi mais aussi doublement ambiguë car d’une part les cahiers originaux sont bien destinés aux services d’archives et, d’autre part, on ne voit pas à quel moment devrait intervenir cette destination finale? Et quelles seraient les stations du chemin entre la création et cette destination finale?
  • on constate le besoin de réaffirmer que les cahiers de doléances sont des documents d’archives publics. Mais qui pouvait en douter?

Très sensible en ce moment aux images à la une, j’avoue que j’ai souri en voyant que l’interview de la nouvelle responsable du service des archives de France dans un magazine professionnel était illustrée par la photo d’un tas de papiers datant visiblement des années 1990-2000 curieusement légendée « Les contributions citoyennes sont bien des archives publiques selon le Siaf ». S’il s’agissait d’un courrier trouvé dans un château ou d’un journal intime d’un ministre, on pourrait ergoter sur la question du statut public ou privé du document, mais là, il est gros comme le nez au milieu de la figure que les cahiers de doléances sont des archives publiques par excellence; ils sont l’essence même de la matière définie par la définition légale des archives. Si les cahiers ne sont pas des archives publiques, alors il n’y a pas d’archives publiques! C’est un peu comme si on illustrait une interview d’Anne Hidalgo par une photo de la ville de Marseille au 19e siècle avec le commentaire: « Selon Anne Hidalgo, Paris est bien la capitale de la France »!

Pourquoi il est besoin de rappeler d’aussi énormes évidences?

Désagrégation de l’archivistique française

Cette anecdote sur la vie et le destin des cahiers de doléances, et surtout la façon dont elle est rapportée par la presse, met en lumière un dysfonctionnement déplorable dans la société française: une opération importante concernant des archives majeures de la République est décidée sans que les archivistes publics soient dans la boucle (mais on leur laisse les miettes du stockage final…). La cause de ce dysfonctionnement est double: absence marquée de culture archivistique chez une majorité de responsables politiques, administratifs et médiatiques, corrélée à une absence chronique de réflexion et d’ambition chez les archivistes (quand on en est à revendiquer après la décision, c’est qu’on a échoué à faire prévaloir une autre décision). En effet, la situation présente où les archivistes sont laissés pour compte était hélas prévisible, car les signaux faibles s’accumulent depuis longtemps:

  • la réflexion archivistique en France se recroqueville doucement mais sûrement depuis 40 ans, avec l’abandon par la majorité des archivistes des fondamentaux, de la pensée et de l’ambition archivistiques au profit de discussions sur des « cas pratiques » axés le plus souvent sur la logistique, sur le support (papier ou numérique) ou  sur l’action culturelle, sans chercher manifestement à comprendre comment la société numérique transforme toute la chaîne de l’écrit d’archives, combien il était urgent de redéfinir les concepts de fonds, de provenance, de dossier, de document, etc. au lieu de se contenter d’un entre soi corporatiste. Depuis plus de vingt ans maintenant, des théoriciens de l’archivage (records management) au niveau international ont fait valoir que l’environnement numérique faisait passer les archivistes de gestionnaires d’objets physiques (garde des archives) à des gestionnaires de droits d’accès et de règles de conservation (voir mon billet Custodialité). Mais comment faire boire un âne qui n’a pas soif?
  • la rétrogradation de la « direction » des archives de France en « service » interministériel au tournant du siècle, puis la vacance du poste de responsable de ce SIAF pendant plus d’an;
  • le syndrome du « tout est archive », issu d’une lecture extrémiste de la définition légale des archives du code du patrimoine, se manifestant sous la forme d’une revendication outrancière ici et là de toute copie ou brouillon repéré sur la place publique ou traqué sur les catalogues de marchands d’autographes, tandis que des écrits fondamentaux pour la transparence administrative et la mémoire collective sont détruits tous les jours sans aucune forme de procès dans l’indifférence générale; il y a toujours eu des gens pour vouloir à tout crin arracher la paille de l’œil du voisin sans voir la poutre dans le sien…
  • dans la logique de la remarque précédente, la loi du n° 2015-195 du 20 février 2015 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel a déclaré « trésor national » tout document, tout fichier bureautique, tout mail, tout sms, toute image, etc. produit ou reçu par un responsable public ou un fonctionnaire ou une personne agissant dans le cadre d’une mission de service public: ahurissant de sottise. J’avais en 2015 qualifié cette loi de loi-tarentule… Quatre en plus tard (il faut toujours être patient), le Conseil d’État se prononce pour un retour en arrière avec une restriction de la qualification de trésors nationaux aux seules archives historiques: ouf! mais quand même!
  • le débat pitoyable de la fin 2017 sur les « archives essentielles » parti d’un contresens linguistique…, où les tenants du tout archive (le moindre post it, la feuille de remboursement de Sécu de Mme Michu et j’en passe) se sont arcboutés sur leurs positions délétères (voir mon billet Embrouille).

Je constate avec tristesse que cette profession (qui fut jadis la mienne) a épuisé son énergie à courir après des chimères ou à se regarder dans la glace pendant que le train du numérique prenait de la vitesse. Au bout du compte, la profession des archivistes s’est décrédibilisée auprès des responsables aux commandes déjà peu enclins (par défaut de formation dans leurs grandes écoles, mais c’est encore un autre débat) à promouvoir ni même à s’intéresser à une politique de constitution des traces du gouvernement de la République et de la mémoire nationale. Comment une profession peut-elle cumuler tant de savoir et si peu d’ambition?

Au fait, oui, les cahiers de doléances « Gilets jaune » sont des archives essentielles et constituent un trésor national. Je ne l’ai ni lu ni entendu.

Dommage.

Le rôle de l’intelligence artificielle dans le traitement des cahiers

Mais oublions ces soubresauts organisationnels pour revenir au grand débat et à ceux qui y participent. Le travail d’analyse des « données » extraites des « cahiers » mérite une grande attention car la qualité des résultats exige un certain nombre de précautions.

Dans une vidéo sur le sujet, Alain Garnier s’interroge notamment sur les biais incontournables d’une telle opération et sur la nécessité de réaliser plusieurs analyses différentes afin de contrôler ces biais. Il y a là un enjeu de qualification des données, de prise en compte du contexte (le cahier dans son entier, la mairie et le département producteur, le profil des répondants en ligne, la date de chaque contribution, etc.) et la définition d’un référentiel qui ne soit pas que sémantique.

Au passage, une expérience intéressante serait de soumettre les cahiers de doléances de 1789 aux mêmes traitements technologiques, afin de voir si le résultat concorde avec les analyses manuelles réalisées depuis deux siècles et, si non, de voir quelles sont les différences. Je me lèche les babines rien que d’y penser.

La prise en compte du contexte dans l’interprétation des documents, a fortiori de données atomisées, est au cœur de l’archivistique et de la diplomatique (analyse de l’authenticité des traces écrites) et il y a des décennies voire des siècles d’expertise cumulées sur ces sujets à valoriser (Luciana Duranti et ses équipes le font depuis vingt ans au sein du projet InterPares basé à l’université de Colombie britannique à Vancouver). Bien sûr on peut toujours réinventer la poudre, et même parfois une poudre de meilleure qualité, mais c’est beaucoup de temps perdu et de l’énergie passée gâchée pour la collectivité. Si c’est néanmoins ce qui se dessine, espérons que les deux poudres seront « interopérables »!

Il y a encore d’autres questions que les archivistes, au lieu de se focaliser sur le stockage des supports et l’accessoire, auraient dû mettre en avant : celui de l’archivage des algorithmes de traitement « by design », et celui de la communicabilité de ces cahiers, aujourd’hui et dans la durée, en conformité avec le Règlement général pour la protection des données personnelles (RGPD).

Certes les pouvoirs publics ont décidé que toutes les données seraient mise en ligne sous licence libre https://granddebat.fr/pages/donnees-ouvertes . Je reste réservée sur l’anonymisation effective des données face à la puissance des outils actuels de profilage mais cela ne m’inquiète pas car il me paraît normal d’assumer publiquement ses contributions à un débat national. Un point m’a fait tiquer: l’exigence de transparence rend obligatoire « la mention de paternité » – je ne sais pas ce qu’en pense notre Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, mais je crois qu’un peu de maternité n’aurait pas nui 😊).

Donc, mise en ligne, très bien, mais dans la durée? D’autres événements vont bientôt surgir. Le grand débat sera oublié au profit d’actualités plus actuelles… Qui assurera demain, quand les données du grand débat seront noyées dans des milliards d’autres données, un accès de qualité à ces documents pour les chercheurs, les enseignants, les étudiants, les citoyens qui s’intéressent aux traces de la démocratie?

Tous mes vœux de réussite aux cahiers de doléances, fond et forme!

8 commentaires

  1. Chère Marie-Anne,
    Il reste quelques archivistes qui conservent leur indépendance d’esprit, leur lucidité et qui font la démarche d’exprimer le fruit de leurs réflexions sur le sens de ce métier, merci à vous. Pardon, je n’ai pas trop compris si je pouvais me permettre de vous classer parmi les archivistes mais je crois que vous ne m’en voudrez pas.
    Je ne vois pour ma part pas de pessimisme particulier dans vos propos, affaire de perception sans doute, je sens plutôt « l’optimisme de la volonté », celui que l’on oppose souvent au « pessimisme de la raison ».
    Je vous rejoins particulièrement sur quelques points, que je reprends avec mes mots (vous me direz si je trahis trop votre pensée) : certain-e-s archivistes à force de déceptions, de dépenses d’énergie dans un combat sisyphien (ça, c’est vraiment moi qui l’ajoute), sont tenté-e-s par moment par la résignation, la déprime – à qui n’est-ce jamais arrivé ? – et, hélas, et adoptent dans ces moments-là – trop fréquents – une attitude soumise qui consiste à limiter les dégâts, dire merci quand elles-ils parviennent à ramasser des miettes.
    Je sens aussi, comme vous, une tendance à se recroqueviller sur les aspects techniques du métier, sur lesquels elles-ils peuvent facilement se donner l’impression de briller. Nous sommes en effet les seul-e-s à savoir dénicher dans le RGPD les petites phrases qui justifient la conservation de données intègres à des fins d’intérêt général, de même que nous sommes les seule-s à maîtriser la plupart des aspects réglementaires concernant le traitement des archives de tout le monde. Les compétences techniques ne sont que des outils au service de principes qui doivent absolument rester le cap, et sur ce volet il se peut que la profession manque, en effet, d’ambition – je reprends cette fois vos termes –, alors qu’elle détient « tant de savoir ». Peut-être que ce n’est pas un hasard. On pourrait philosopher sur le rapport entre ambition et savoir, en partant de votre constat. On s’amuserait bien je pense.
    Je n’ai pas autant d’expérience que vous, mais je tiens à dire que beaucoup d’archivistes (dans l’Association des archivistes français et en-dehors) utilisent leur intelligence et leur enthousiasme tous les jours, et font avancer la pensée archivistique. Elles-ils n’osent peut-être pas assez s’exprimer. Par ailleurs, le numérique perturbe, mais nous connaissons quelques avancées – c’est un sujet que nous avons développé avec Chloé Moser : en retournant aux fondamentaux du métier, nous retombons toujours, toujours, toujours sur nos pattes. Vous faites d’ailleurs partie des personnes qui proposent régulièrement des retours aux fondamentaux. Ceux qui nous permettent de rester « intègres », autant que les données qui arrivent dans un SAE digne du nom, après avoir traversé des épreuves…
    Il est important de mettre en avant ces intelligences et ces avancées, justement pour lutter contre cette résignation que vous déplorez et que je déplore aussi. Ce qui n’enlève rien à l’utilité des alarmes que vous lancez !
    Je reviens aussi sur Madame Michu, il faut se méfier d’elle, car c’est peut-être par sa feuille de sécu que surgit la question essentielle… justement, parce que les interrogations prises sous des angles trop techniques parasitent parfois les questions de fond comme celle-ci : faut-il sauver Madame Michu ?
    Pardon pour ce long message… je crois que j’avais envie de bavarder avec vous 🙂

    • Chère Agnès,
      Discutons! Avec plaisir.
      J’aimerais que nos discours se recouvrent mais à vous lire je n’en suis pas tout à fait certaine à ce stade. Est-ce une question de mots ou une affaire de concepts? Il serait instructif de poursuivre l’échange pour approfondir le débat, ici ou ailleurs, pour le découvrir.
      En tous cas, je veux redire que mes propos ne visent pas les archivistes en tant que personnes car je sais bien que beaucoup sont de vertueux et vertueuses professionnel(le)s. Je voulais pointer le fait – car c’est un fait – que leur manque de visibilité dans la société (ou leur visibilité partielle, orientée histoire et de plus en plus sociologie) est dû à la fois à la tiédeur de la réflexion sur ce que recouvre réellement le « records management » à une époque numérique où le « records management » doit être augmenté ou mourir, et à l’absence de politique archivistique dans ce pays, politique que devrait logiquement porter les institutions archivistiques, administrative ou associative.

  2. Cet article se veut sans aucun poil à gratter et il l’est. Je pense que nous sommes assez nombreux à avoir déplorer la non visibilité pour le gouvernement des services d’archives et principalement des Archives nationales. Le statut de la BnF et des AN, ainsi que les grands écarts de budgets ne sont pas neutres, et l’épisode des cahiers du grand débat n’en sont qu’un symptôme.

    La communauté des archivistes (dont vous nous dîtes ne plus faire partie) a su aussi prendre des initiatives sans attendre les directives du gouvernement. Ces archives communales ont fait le choix d’archiver les originaux et ne fournir que des copies pour le traitement par la BnF, d’autres services ont réalisés la numérisation avant envoie via les préfectures à Paris. Je pense qu’il est sévère d’imputer la grande improvisation (les versions sur le traitement de ces documents ont changé d’heure ne heure) du gouvernement aux archivistes. Un peu comme cela semble dans son ADN l’archiviste a encore dû s’adapter, répondre à des urgences et faire au mieux avec les moyens qui sont les nôtres.

    Je suis le premier à me retrouver dans un désir de plus d’ambition de notre profession mais je ne partage pas le niveau de pessimisme.

    Je trouve aussi qu’il y a un grand oubli dans votre article. l’Histoire n’attends plus demain pour se faire, les analyses ou traitement se feront sans doute aussi dans quelques années mais ils existent aujourd’hui.

    La communauté de la civitech et les acteurs de l’Open Data sont déjà en action, étonnant de ne pas du tout en faire mention. Je partage ici deux liens un vers le forum Team Open Data (https://teamopendata.org/t/donnees-du-grand-debat/1079) notons pour aider à vous remonter le moral que nombreux sont les archivistes présents et actifs sur ce forum. Deuxième lien vers les ressources déjà disponibles en Open Data (https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/5c5c3236634f4155110aa4ea/)

    Enfin un lien vers un portail mis en place par des citoyens d’annotation de participations à la plateforme du grand débat: https://grandeannotation.fr/ Ici je me félicite que les citoyens se saisissent de l’objet de cette consultation hors pouvoir public quelqu’il soit.

    • Merci de votre texte, que je suis heureuse de lire et d’accueillir sur mon blog. Votre témoignage est de nature à renouveler l’espoir après mon cri, je l’admets, volontairement alarmiste.
      N’exerçant plus aujourd’hui comme archiviste (j’ai parlé de profession, pas de communauté ni de compétences), je n’ai de cette affaire que l’image qu’en donnent les médias et c’est donc sur ce que j’ai vu sur le Net (notamment les prises de position des institutions archivistiques) que j’ai basé ce nouveau constat de délitement de l’archivistique française, constat partagé (si j’en crois les témoignages reçus) par un bon nombre d’archivistes.
      Le manque de visibilité n’est pas imputable qu’à ceux qui ne voient pas; il l’est aussi à ceux qui ne présentent pas le relief nécessaire pour être vus!
      Mon propos sur le forum Yahoo « archive-fr » au sujet du récent MOOC de la CNIL est un autre volet du constat de cette invisibilité désolante et, sur ce sujet-là (la protection des données personnelles), je constate quotidiennement l’implication efficace de nombreux archivistes dont le discours ambiant continue d’ignorer les compétences. Alors, n’ayant pas d’intérêt à garder ces réflexions pour moi-même, je m’exprime…

  3. Traiter de la même façon les cahiers de doléance de 1789 et ceux de 2019 est une idée lumineuse : astucieuse, particulièrement féconde pour les chercheurs et probablement porteuse d’étonnements entre résultats issus de l’I.A. et trace actuelle de cet événement chez nos historiens.
    J’espère avec beaucoup de conviction que cette idée sera reprise par des gens compétents « aux manettes ».

    Merci Marie-Anne pour ce bel article qui éclaire ma matinée …

    • 🙂
      Je ne sais pas quel est l’avenir de cette belle idée. Il faut constituer une équipe ad hoc, trouver un sponsor et des financements (un projet de financement participatif?) et procéder au recensement de ce qui existe déjà (cahiers révolutionnaires déjà numérisés et transcrits), mais les sources sont éparpillés dans plusieurs centaines de lieux… C’est du boulot!

  4. En matière d’illustration mal choisie, il y a encore pire à mon avis ! L’image du cahier de doléances de 1789 choisie par les AN pour se faire mousser sur les réseaux sociaux et reprise par l’AAF pour son communiqué est en effet un cahier imprimé ! Comme s’il n’était pas possible de montrer l’image d’un cahier sous sa forme manuscrite originale, forme dont on trouve sûrement bien plus d’exemplaires dans les archives que de versions imprimées ! Quand on prétend expliquer les compétences respectives des archives et des bibliothèques, c’est vraiment se tirer une balle dans le pied !

    • On peut voir ça comme ça effectivement, même si on sait bien qu’il y a des manuscrits dans les bibliothèques et que certaines archives sont imprimées. L’image à la une n’est pas neutre dans le ressenti du lecteur (surtout quand il se contente de regarder sans lire).
      Plu généralement, je peux comprendre que certains blogs ou posts choisissent des illustrations à la va-comme-je-te-pousse, en soumission naïve à la mode du moment, mais quand cela vient de professionnels de l’information, je trouve que ça fait cordonnier qui exhibe ses vieilles chaussures.

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