Valérie Poinsotte, archiviste brillante, maîtresse de conférences en archivistique à l’Université d’Angers de 1995 à 2003, a quitté en 2009 sa famille, ses collègues, ses étudiants, ses amis, pour ne plus revenir. Des hommages lui ont été rendu ici et là, notamment par Thibaut Girard . Mon billet anniversaire est un peu tardif car le jour de sa disparition est précisément le 18 janvier 2009 mais c’est l’année qui est inscrite dans ma tête.
Valérie disparue, il peut donc paraître incongru de lui adresser un message. Mais, si on réfléchit, à qui d’autre pourrais-je exprimer ma tristesse quand je pense à elle, quand je n’entends pas – et pour cause – les réponses aux questions que je lui pose car nos échanges archivistiques et diplomatiques, s’ils n’ont pas été très nombreux, ont été intenses et vivifiants; et ils le restent.
Donc, Valérie, tu nous manque, tu me manques.
Tu as su donner une impulsion à la réflexion archivistique, tant auprès des étudiants avec tes fameuses « disputes » (voir l’explication détaillée sur le blog de la formation) qu’auprès de toute la communauté archivistique en organisant des journées d’étude, par exemple celle, en 2001, sur la recherche en archivistique où me revint l’honneur et le plaisir de la conclusion.
Tu as également fait la promotion de la diplomatique qui nous a fait transpirer mais nous a enrichies, à quelques années d’écart, sur les bancs de l’Ecole des chartes, en créant un cours de diplomatique contemporaine dans les enseignements du DESS, aujourd’hui master2.
Ton dynamisme sur ces questions professionnelles « essentielles » ne serait pas de trop aujourd’hui pour maintenir la réflexion individuelle et collective, mais je veux croire que, là où tu es, tu sauras encore inspirer les bonnes volontés!
Tiens, je viens de retrouver un document de travail du printemps 2011 où je préparais le lancement de ce blog avec une série de billet en -ité: j’y avais noté les mots « inventivité » et « ingéniosité » avec ton nom comme illustration d’un billet que finalement je n’ai pas écrit…
Et puis, c’est encore toi qui, sans le savoir, m’as fait prendre conscience pour la première fois du big data et de la surveillance opérée par les réseaux sur Internet. C’était en septembre 2014, plus de cinq ans après ta disparition, et le RGPD ne faisait pas encore la une de la presse. Pour une raison que je n’ai pas mémorisée (une de mes réflexions diplomatiques habituelles qui me faisait penser à toi sans doute), j’ai googlisé ton nom… Et j’ai appris, avec un frisson dont mon dos, lui, a gardé la mémoire, que tu avais fin 2008, inscrit dans tes « favoris » sur le site de Mediapart un article intitulé « Un gros trou dans les archives de BNP-Paribas ». Rien de fracassant dans ce fait ni dans sa publicité si ce n’est que je doute que, cliquant alors sur l’icône « Mes favoris », tu aies imaginé que n’importe quel internaute pourrait découvrir ton geste des années plus tard.
Tu étais donc abonnée à Mediapart où chaque abonné dispose, par défaut, d’un espace où il peut publier ses propres billets. Je sais que tu n’as pas utilisé cette option mais l’algorithme de Google (ou les algorithmes combinés de Mediapart et de Google) a anticipé ton choix et créé le résultat de recherche suivant (procédé assez courant des moteurs de recherche pour attirer le chaland):
Évidemment, j’ai cliqué et appris que tu n’avais pas écrit de billet de blog…:
J’entends d’ici ton rire devant cette révélation sur la place publique de tes « données personnelles »… Mais je sais que tu ne m’en voudras pas d’utiliser ici tes traces numériques. D’ailleurs, je ne révèle rien. Tout un chacun peut aller vérifier sur le site de Médiapart (je l’ai fait hier): tes données y sont toujours, dix ans plus tard, au mépris du RGPD car leur conservation par Médiapart et a fortiori leur maintien en ligne ne sont, sauf erreur de ma part, ni contractuels ni licites ni légitimes ni d’intérêt historique ou statistique. Qui pourrait aujourd’hui demander leur destruction? Ou bien l’idée de cette « présence d’absence » de blog sur le site du journal est-elle de nature à entretenir ton sourire?
Merci, Valérie.
La belle dispute virtuelle: comment archiver les pages vides.. mais nominative.
Je suis sur que cela l’aurait fait sourire elle qui posait souvent des questions faussement naïve.
Un beau sourire pour la journée.
Merci, Jean-Daniel.