Il ne s’agit pas d’une période révolue où la préposition « de », placée devant un nom propre, aurait symbolisé le pouvoir aristocratique. En effet, bien que l’on imagine volontiers qu’après l’abolition des privilèges au cours de la nuit du 4 août 1789, le citoyen Dubois a damé le pion au seigneur du Bois-Joli, il faut admettre que la particule dans les noms de famille n’a jamais été une preuve de noblesse, et inversement.
Il s’agit de la période présente avec ses nouvelles particules qui s’invitent de plus en plus souvent dans l’actualité littéraire, scientifique, écologique.
Le succès littéraire des Particules élémentaires de Michel Houellebecq, en 1998, a fait entrer dans le langage courant une expression scientifique déjà ancienne. Et le citoyen du XXIe siècle est devenu familier des particules de l’univers qui impacte sinon sa vie, du moins son avenir.
En physique, les particules élémentaires, autrement dit les plus petits constitutifs de l’univers, ont longtemps été les atomes. Puis les atomes ont été supplantés par les électrons, les protons et les neutrons. Enfin sont venus les quarks, en attendant la suite…
Au plan écologique international, les microparticules de plastique qui envahissent les eaux des grands lacs d’Amérique du Nord et de l’Atlantique Nord, font froid dans le dos, même sans mettre le pied dans l’eau glacée…
Au quotidien, les particules sont fines et le font savoir par voie de presse. Alerte ! Les volcans sont en cause mais on n’y peut pas grand-chose. Alors, ce sont le feu de cheminée, le véhicule qui roule au diesel, les industries, etc. qui sont montrés du doigt. Ça fait deux siècles que ça existe mais on en parle seulement maintenant. Est-ce cela, la société de l’information ?
On pourrait dire, stricto sensu, qu’une pièce d’archives est une particule d’un fonds d’archives et que certains fonds d’archives comptent des millions de particules documentaires mais ni les archivistes ni les historiens ne s’expriment comme ça. Dans l’environnement papier, où l’appartenance d’une feuille à un document, d’un document à un dossier, d’un dossier à une série est matérielle, réelle, visuelle, l’idée est effectivement saugrenue.
Mais dans l’environnement numérique, la donnée explose, l’information se désagrège en myriades de petits morceaux, le document s’atomise et les masses de données qui s’accumulent sur les serveurs, le big data, en viennent à n’être plus que des microparticules d’information. Et quand je dis « atomisation », je ne suis déjà plus à la page. Je devrais parler d’« électronisation » et de « quarkisation ».
Quelles conséquences pour les humains ? J’en vois deux : d’une part, le risque de ne plus savoir rattacher une donnée à un document (document que je définis comme trace écrite, orientée dans une relation ou un contexte – je pourrais dire vectorisée – datée, chargée d’un sens) ; d’autre part, le risque de voir l’environnement informationnel pollué par des info-particules vides de sens.
Nota bene : ne pas confondre une particule fine avec une « petite partie fine », celle qu’organisent les proxénètes invétérés, les politiciens démangés par la chose et autres trafiquants de tous poils…
Élémentaire, mon cher Watson !
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