Petit billet de saison.

À quelques jours de Noël, alors que les cahiers de doléances 2018-2019 connaissent un très notable regain d’intérêt de la part de tous (élus, citoyens, chercheurs, archivistes), je me suis demandé s’il était question de Noël dans les cahiers de doléances et, si oui, dans quels termes.

Voici ce qu’il en est pour les cahiers de Charente-Maritime qui me sont maintenant familiers.

Pendant la trêve des confiseurs, les mairies restent ouvertes et les cahiers mis à disposition des administrés continuent à recevoir des contributions de citoyens et citoyennes, même si on note une pause (les contributions inscrites entre le vendredi 21 décembre 2018 et le mercredi 2 janvier 2019 représentent environ 4 % des contributions datées, lesquelles constituent la moitié du total des contributions).

Au total, sur les 3138 contributions, une vingtaine évoque Noël. Dans l’absolu, c’est peu et ce billet est assurément anecdotique mais cette sélection donne toutefois un éclairage intéressant sur le corpus.

Le père Noël est évoqué deux fois, dans des vœux qui paraissent plus désabusés qu’humoristiques (l’humour est plutôt rare dans les cahiers). La première fois est une brève contribution d’un Gilet jaune, amère et même grinçante dans la signature, illustrant la rupture entre la classe politique et la population :

La seconde contribution, faussement naïve, a trait à l’écologie :

À noter que ces deux contributeurs remercient d’avance le père Noël…

Un « citoyen et contribuable en colère » tient des propos plus acerbes. Dans sa longue diatribe, il écrit : « Certains ont pensé que des mesurettes dispensées aux gueux en gilets jaunes (et à ceux qui les soutiennent) allaient faire cesser la colère et que tous ces braves cons iraient illico préparer Noël et consommer… ».

Un couple remercie le maire pour la décoration de Noël dans la commune. Un « Bon Noël » conclut une doléance. Noël apparaît ici ou là comme un élément de calendrier. Une dame qui habite une commune de 200 habitants et plaide pour le rural précise que sa fille, artisane « a eu ses marchés de Noël pourris par les manifs des W.E ». Une autre femme propose une série de mesures pour l’écologique dont celle de « récolter les sapins de Noël dans des pots pour les donner à la commune, pour replanter ». Un citoyen défend les « vacances de Noël » comme les « vacances de Pâques » au motif qu’on ne doit pas confondre laïcité et patrimoine.

L’autre moitié des contributions qui évoquent Noël parle plus précisément de la prime de Noël, avec diverses revendications ou critiques liées aux critères de son attribution :

  • Qu’elle ne soit pas versée qu’aux bénéficiaires de certains minima sociaux (RSA…) mais également aux personnes handicapées ;
  • Qu’elle bénéficie au premier chef aux enfants et aux couples avec enfants : « Pourquoi donne-t-on la prime de Noël à des couples sans enfants, alors que les cadeaux de Noël sont principalement pour les enfants.… moi j’en ai deux » ;
  • Qu’elle soit supprimée (comme le RSA) ;
  • Une personne demande si les musulmans ont droit à la prime de Noël qui est une fête chrétienne…
  • Deux contributions dénoncent la (prétendue) prime de Noël que se verseraient députés et sénateurs.

Ce sujet de la prime de Noël, mineur par rapport aux revendications récurrentes (rétablissement de l’ISF, référendum d’initiative populaire, indexation des salaires et retraites, reconnaissance du vote blanc, suppression des avantages aux anciens présidents, etc.), est cependant assez représentatif de l’expression citoyenne consignée dans les cahiers : une forte attente de justice sociale, avec des visions en partie contradictoires.

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